L'importance d'être Wilde
de Philippe Honoré, Oscar Wilde
Mise en scène de Philippe Person
Avec Emmanuel Barrouyer, Anne Priol, Pascal Thoreau
C’est le spectateur, est non la vie, que l’art reflète réellement.
Oscar Wilde (1854-1900). Un artiste novateur, un homme de grand esprit, un amoureux de la beauté, un homme toute en finesse... Selon certains, un débauché, un homme scandaleux aux murs légères, un sodomite. Quoique l’on ait pu dire ou penser d’Oscar Wilde, cet homme ne laisse personne indifférent. On parle toujours de lui aujourd’hui et ses uvres (notamment le chef-d’uvre Le Portrait de Dorian Gray) sont connues de tous. Ses aphorismes également. Citations courtes pleines d’humour et d’esprit.La compagnie Philippe Person rend hommage à ce grand homme qui passa sa vie à défendre la liberté de l’être et qui cherchait à élever les consciences. Une heure et quart pour transmettre la vie et l’uvre d’Oscar Wilde, c’est court mais le projet se tient. Le trio de comédiens (une femme et deux hommes) jonglent avec habilité entre le roman, les pièces de théâtre, les contes, les aphorismes, les lettres et même un extrait du procès de Monsieur Wilde. L’influence britannique, pays où vécut longtemps Oscar Wilde est nettement marquée. Pourtant c’est en Irlande que naquit Oscar Wilde et il mourut dans le dénuement le plus total à Paris. Aussi, L'Importance d’être Wilde (jeu de mot se référant à la pièce L’Importance d’être Constant) possède-t-elle la particularité de l’humour anglais, très smart et décalé.La scénographie est simple. Un canapé de velours rouge des plus chic, trois petits fauteuils de cuir, un grand tableau patchwork de toutes sortes de portraits et une grande cage de tissu noir très fin. Esthétique, elle est le reflet du dandysme et du bon goût. Tout comme les costumes d’inspiration de lords britanniques. De bon goût, quoique les chaussettes écossaises restent matière à débattre.Quoi qu’il en soit, l’univers de Wilde est agréablement retransmis dans cette création originale. Il n’est pas question d’un bête exposé chronologique, mais d’une plongée dans la vie, l’uvre et l’univers de Wilde sous toutes ses formes. Aussi, découvre-t-on les trois identités d’Oscar Wilde. Le premier, dandy à l’attitude provocatrice pour l’époque et au verbe fin. Le deuxième, C3.3., l’homme blessé et désespéré, incompris et montré du doigt par la société. Et enfin, Sébastien Melmoth. Un nom d’emprunt lors de son séjour en prison accusé de sodomie après avoir trainé devant la Cour le père de son amant à la suite d'un outrage public dont Oscar Wilde fut la victime. L’arroseur arrosé ! Ainsi, les changements d’états d’Oscar Wilde sont traités avec finesse et intelligence. De son succès et sa vie de plaisir, à sa chute jusqu’à sa fin désastreuse, humiliante et terrible.Les comédiens sont à la fois les narrateurs et les personnages de l’histoire. Interprétant Oscar lui-même, ses proches et les personnages de ses uvres. Ils sont drôles, vrais, justes et s’amusent. Un régal de les voir sur scène et d'en suivre l’évolution.Plusieurs musiques contemporaines, rock ou plus classiques, accompagnent parfois les différentes scènes. Le choix est subtil et judicieux, porteur de l’univers de la scène sans exagération.Les comédiens sont investis dans ce travail. On ressent leur amour pour le grand artiste Oscar Wilde. Et on ne peut que saluer l'important travail de recherche qui a été effectué en amont. Mention très bien pour les trois comédiens. Emmanuel Barrouyer, grandement aidé par son physique, incarne un Bossie (le jeune amant d’Oscar Wilde) saisissant. Quant à Anne Priol, sa scène lorsque Salomé parle à la tête du prophète, est magnifique.L’Importance d’être Wilde est une réussite. Un hommage vibrant à un grand homme qui paya de sa vie et de son sang son besoin de liberté et d’expression. Un artiste qui passa par toutes les phases que peuvent offrir la vie afin de devenir un homme entièrement accompli. Oscar Wilde, un être résolument rock et sauvage. Un personnage ô combien important dans l’histoire de l’art et de la vie. Sans lui, nous n’en serions peut-être pas là aujourd’hui. Merci à lui et merci à la compagnie Philippe Person pour cette sublime création.
Cyriel Tardivel
13/07/2012
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