Les Nuits blanches de l’Ange Bleu
de Luana Kim
Mise en scène de Alicia Roda
Avec Luana Kim, Frédéric Thérisod
Un spectacle émouvant, basé sur la mémoire, la nostalgie d’une époque, la figure d’une Marlène Dietrich jouant à merveille les Mère Courage...
Si Mistinguett fut le symbole de Paris, avec sa gouaille, sa voix trainante et ses jambes, Marlène Dietrich incarna Berlin. Son nom à lui seul est unz invite ou un programme : une caresse qui s’achève en coup de cravache (dixit Jean Cocteau). Le cinéma des années trente ne retient que la femme fatale. Mais, ressuscitée pour nous, Marlène crève la toile des fantasmes.
Quand les spectateurs gagnent leurs places, une femme est déjà là, sur scène, assise dans un fauteuil roulant. Immobile, elle est peut-être contrefaite, vu la pose qu’elle a adoptée, légèrement de travers. Des lunettes noires protègent son anonymat. La chevelure blonde, un tantinet mousseuse, évoque un passé qui se dérobe à notre mémoire. Elle a sans doute été quelqu’un, mais, pour l’heure, c’est une femme handicapée qui sur un ton véhément appelle un homme, occupé dans la pièce du fond. Il lui répond brièvement et par saccade. Il s’agirait d’un certain Sacha : ex-amant, factotum, secrétaire ?... Une ombre en tous cas. Comme toutes celles qui ont défilé dans sa vie et qui, en fin de compte, se sont évanouies. La voix de cette femme prend pourtant un tour enjoué. Avec difficulté, celle-ci se traîne jusqu’à la fenêtre, histoire de faire un signe de reconnaissance à un personnage dans la silhouette se découpe dans la fenêtre d’en face. Une des fenêtres du Plaza, le grand hôtel de l’avenue Montaigne, où elle habita naguère, au temps de sa gloire. Le personnage en question l’appelle au téléphone. C’est un militaire répondant au nom de… Jean Rêve.
Les militaires, ça la connaît. Et le correspondant l’assimile aussitôt à ces femmes faciles, hystérique de l’uniforme. Certes, elle aime l’uniforme. Mais parce qu’elle le porta, en tant que militaire elle-même et au grade de commandant. Commandant de l’armée américaine, venue délivrer l’Europe des nazis. A-t-elle murmuré son nom ? Oh, peine ! Mais nous, spectateurs, nous savons qu’il est : Marlène Dietrich, dans la dernière phase de existence, ouverte seulement à quelques familiers. C’est ça le temps après la gloire.
La machine à souvenirs se déclenche devant nous et, abandonnant son fauteuil roulant, une jeune femme nous surprend, dynamique et un peu folle. Luana Kim, qui a écrit le texte, entre d’autant mieux dans la peau de la star. Elle la campe, bravache, reprenant tous les standards qui ont fait son succès. A commencer par le célèbre « Ich bin von Kopf bis Fuss auf Liebe eingestellt » : « je suis fait pour l’amour de la tête aux pieds. » Et c’est L’Ange Bleu, Lola-Lola que l’on assimilera au nom du cabaret. Alicia Roda – qui met en scène le spectacle – a reconstitué la célèbre pose du film. Lola-Lola est assise de guingois sur le coin du piano, haut-de-forme aguichant et jambe croisée en appui sur le genou. Surgit le premier homme. Celui à qui elle doit tou : Josef von Sternberg. Des studios de Babelsberg, il l’entraine à Hollywood.
Frédéric Thérisod l’incarne en appuyant sur le côté américain, presque texan, de l’artiste, lui, qui, au départ, singeait les aristocrates. Ici le cigare remplace le monocle. Dans son ombre, se glise le compositeur Friedrich Höllander, spécialiste des musiques de film. C’est David Herridge qui l’incarne. Et avec brio, s’installant au clavier. Sous nos yeux, Marlène prend son envol. Belle performance de Luana Kim dont la voix est juste, touchante. Lili Marleen – le standard que l’on attendait tous – est ici interprétée en américain. Je regrette personnellement qu’elle ne le fût pas dans les trois langues, ce que faisait Marlène Dietrich dont le tour de force avait été de confisquer une chanson nazie, de se l’approprier et de la faire reprendre en chœur par les troupes yankee.
Les Nuits Blanches… est un spectacle émouvant, basé sur la mémoire, la nostalgie d’une époque, la figure d’une Marlène Dietrich jouant à merveille les Mère Courage on ne peut que l’en féliciter mais préférant en fin de compte s’abandonner dans les bras de Jean Gabin, son immense amour. Immense amour que Frédéric Thérisod reprend à son compte. Mention spéciale aux costumes de Frédéric Morel.
Quand les spectateurs gagnent leurs places, une femme est déjà là, sur scène, assise dans un fauteuil roulant. Immobile, elle est peut-être contrefaite, vu la pose qu’elle a adoptée, légèrement de travers. Des lunettes noires protègent son anonymat. La chevelure blonde, un tantinet mousseuse, évoque un passé qui se dérobe à notre mémoire. Elle a sans doute été quelqu’un, mais, pour l’heure, c’est une femme handicapée qui sur un ton véhément appelle un homme, occupé dans la pièce du fond. Il lui répond brièvement et par saccade. Il s’agirait d’un certain Sacha : ex-amant, factotum, secrétaire ?... Une ombre en tous cas. Comme toutes celles qui ont défilé dans sa vie et qui, en fin de compte, se sont évanouies. La voix de cette femme prend pourtant un tour enjoué. Avec difficulté, celle-ci se traîne jusqu’à la fenêtre, histoire de faire un signe de reconnaissance à un personnage dans la silhouette se découpe dans la fenêtre d’en face. Une des fenêtres du Plaza, le grand hôtel de l’avenue Montaigne, où elle habita naguère, au temps de sa gloire. Le personnage en question l’appelle au téléphone. C’est un militaire répondant au nom de… Jean Rêve.
Les militaires, ça la connaît. Et le correspondant l’assimile aussitôt à ces femmes faciles, hystérique de l’uniforme. Certes, elle aime l’uniforme. Mais parce qu’elle le porta, en tant que militaire elle-même et au grade de commandant. Commandant de l’armée américaine, venue délivrer l’Europe des nazis. A-t-elle murmuré son nom ? Oh, peine ! Mais nous, spectateurs, nous savons qu’il est : Marlène Dietrich, dans la dernière phase de existence, ouverte seulement à quelques familiers. C’est ça le temps après la gloire.
La machine à souvenirs se déclenche devant nous et, abandonnant son fauteuil roulant, une jeune femme nous surprend, dynamique et un peu folle. Luana Kim, qui a écrit le texte, entre d’autant mieux dans la peau de la star. Elle la campe, bravache, reprenant tous les standards qui ont fait son succès. A commencer par le célèbre « Ich bin von Kopf bis Fuss auf Liebe eingestellt » : « je suis fait pour l’amour de la tête aux pieds. » Et c’est L’Ange Bleu, Lola-Lola que l’on assimilera au nom du cabaret. Alicia Roda – qui met en scène le spectacle – a reconstitué la célèbre pose du film. Lola-Lola est assise de guingois sur le coin du piano, haut-de-forme aguichant et jambe croisée en appui sur le genou. Surgit le premier homme. Celui à qui elle doit tou : Josef von Sternberg. Des studios de Babelsberg, il l’entraine à Hollywood.
Frédéric Thérisod l’incarne en appuyant sur le côté américain, presque texan, de l’artiste, lui, qui, au départ, singeait les aristocrates. Ici le cigare remplace le monocle. Dans son ombre, se glise le compositeur Friedrich Höllander, spécialiste des musiques de film. C’est David Herridge qui l’incarne. Et avec brio, s’installant au clavier. Sous nos yeux, Marlène prend son envol. Belle performance de Luana Kim dont la voix est juste, touchante. Lili Marleen – le standard que l’on attendait tous – est ici interprétée en américain. Je regrette personnellement qu’elle ne le fût pas dans les trois langues, ce que faisait Marlène Dietrich dont le tour de force avait été de confisquer une chanson nazie, de se l’approprier et de la faire reprendre en chœur par les troupes yankee.
Les Nuits Blanches… est un spectacle émouvant, basé sur la mémoire, la nostalgie d’une époque, la figure d’une Marlène Dietrich jouant à merveille les Mère Courage on ne peut que l’en féliciter mais préférant en fin de compte s’abandonner dans les bras de Jean Gabin, son immense amour. Immense amour que Frédéric Thérisod reprend à son compte. Mention spéciale aux costumes de Frédéric Morel.
Pierre Breant
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