On peut dire que Christelle Meyer Rossel est un sacré bout de femme. Pour son deuxième seul-en-scène dont elle signe l’écriture et la mise en scène aux côtés de Chloé Galzin Turco, ellese livre. Enfin, pas complètement… Elle se livre plutôt à un combat avec elle-même. Une artiste engagée. Ses textes sont humoristiques, corrosifs et parfois absurdes. Militante aussi. Ses thèmes de prédilections sont la non-consommation, l’appellation contrôlée du gruyère… Des textes drôles et loufoques, mais défendant une idée, voire un idéal.
Avec Cri d'amour, ha non, c'est pas ça le texte, elle vient nous parler d’amour. Ah oui, mais parler d’amour ce n’est pas facile... Et puis, il faudrait voir à ne pas tomber dans le mielleux, voire le cul-cul. Et puis, encore, pour une célibataire endurcie qui avait renoncé à toutes formes d’amour pour diverses raisons, comment tenir un spectacle de près d’une heure en abordant ce thème si particulier ?!
Alors, Christelle se bat. Enfin, elle se débat avec elle-même. Une véritable analyse psychanalytique. Le moi et le sur-moi conversent tentant l’un l’autre d’imposer leur idée. Ou si l’on préfère la femme-comédienne et son agent, sa boîte de production, son metteur en scène, en opposition totale et pourtant obligés de cohabiter et de trouver un terrain d’entente.
Alors, elles vont chercher des sujets autres à traiter. Des thèmes simples, efficaces, différents et qui parlent à tout le monde. Ainsi sont abordés les thèmes du sexe, de l’alcool, des 37 ans... Mais avec malice et surtout, parce que c’est ce qui lui tient à cœur au plus profond d’elle, elle en revient toujours à nous parler d’amour.
Christelle Meyer Rossel nous livre un seul-en-scène magnifique, drôle et percutant. Bien plus intéressant que les one-man-shows apostrophant sans véritable mesure le public, et abordant toujours les mêmes thèmes banals du quotidien, pour ne pas dire communs, inintéressants et souvent vulgaires. Ici "Cri" se livre véritablement, elle monte sur scène, donne de la voix et du corps parce qu’elle a quelque chose de profond à partager. L’amour est entré dans sa vie, a tout bouleversé et elle veut le communiquer à son public. Mais ce n’est pas un simple désir égoïste ou égocentrique de sa part. Non, c’est une réelle interrogation, une question qu’elle pose au public sur l’amour et ses combats.
Ses textes sont puissants, truffés de jeu de mots et de boutades ou références qui font hurler de rire. Les parties sont bien écrites et agencées. Et pour couronner le tout, Christelle donne du corps. Elle se double, dédouble et même se triple avec ses personnages conversant entre eux. Le "ça" apparaît même avec son nez rouge, rouge de clownerie et de vin, pour nous réciter de la poésie et nous livrer sa version de la vie. Le verre à moitié vide ou à moitié plein...
Cette merveilleuse comédienne se donne et se met en danger. Nous observant debout sur scène dès l’entrée du public. Semblable aux fauves dans l’arène scrutant la foule qui s’apprête à la dévorer. Il n’est jamais évident de se livrer seul sur scène, surtout lorsque l’on parle de soi, lorsque l’on livre son cœur... Christelle le fait magistralement dans son deuxième seul-en-scène Cri d'amour, ha non, c'est pas ça le texte. Oui, l’amour encore et toujours, parce que finalement, qu’il soit cul-cul, torturé, sadique ou passionné, l’amour est et sera à jamais un thème qui parle à tout le monde !