Confiné dans la salle cabaret chaleureuse et au cachet historique du théâtre de l'Essaion, un halo de lumière met en évidence Sophie, seule en scène. Sophie parle, mais à qui s'adresse-t-elle ? Surprise de remarquer la présence du public, la comédienne, ô combien enchanteresse, convie le public à écouter une histoire, une histoire au cachet particulier. Sophie-enfant taquine sa mère d'un subtil caprice, l'ennui. Maman chérie lui présente une harpe, une harpe pour apprendre la musique. Quel étrange instrument ! Sophie intriguée, les yeux médusés, regarde du haut de ses cinq ans l'imposant mastodonte : déjà, il est plus grand qu'elle; et puis, il a des cordes et des cordes, plus que les doigts des deux mains réunies; et même des pédales.C'est décidé, la fillette apprendra à jouer de la harpe... debout. L'ennui, c'est qu'il va falloir donner un prénom à cette nouvelle copine, il faut l'avouer imprévue. Providence, c'est ainsi qu'elle aurait pu s'appeler. In fine, ce sera Angela. Une vocation est née, la musique. Sophie grandit avec la harpe. Ses doigts glissent le long des cordes, de la caisse de résonance s'échappent des airs de trouvère, Bach, Mozart, Haendel. Angela partage la vie de Sophie avec ses joies, ses peines, ses rencontres d'un instant. C'est l'alliance en or d'une artiste avec sa harpe, symbiose musicale pour le meilleur et pour le rire. Sophie, c'est une artiste radieuse, conviviale, géniale, prête à tout pour Angela, jusqu'à vivre un amour fou pour...Angela, tout de bois vêtue, a du corps, une certaine redondance qui met en valeur son col de cygne, ses quarante-sept cordes, sa caisse de résonance, antre des notes de musique classique et de petites chansons. Leur vie se conjugue en chansons, des chansons d'amour que l'artiste dédie à la harpe, des concertos de musique classique où s'invitent régulièrement Mozart, Haendel et La Moldau. La comédienne se fond en une multitude de personnages rencontrés au cours de sa vie. Des personnages haut de forme comme le flûtiste avec lequel elle connait l'amour charnel, à jouir en femme adultère; ou encore avec l'indécente Julie, un robot musicien qui ose rivaliser dans les concours de soliste.Voilà une galerie de portraits qui laissent la harpiste de cire, mais n'en demeure pas moins qu'Ange est lasse, un rien jalouse. Elle reste de bois. La fusion musicale entre Sophie et Angela laisse un débord d'émotion s'installer et envahir le public. La nostalgie s'invite sur scène entre éclats de rires et larmes de plaisir. Un halo de lumière filtré semblable à un clair de lune se pose délicatement sur l'artiste dont les doigts continuent d'enchâsser les cordes à la caisse de résonance d'où Mozart, Haendel et La Moldau laissent échapper un léger murmure d'émerveillement. Cette pièce, ce n'est pas un one woman show. C'est un grand spectacle intimiste, une très belle histoire d'amour joliment contée par Sophie et chantée en cordées par la harpe. Angela et Sophie, c'est un moment de vie unique sur la scène de la vie, côté Seine dans les coulisses de Paris. "Essaion" d'aller voir cette pièce. "Essaiez" et vous serez enchantés !