Au cinéma, la sortie de Festen a connu un succès immédiat tant l'histoire impressionna par sa cruauté et sa beauté. Le film avait d'ailleurs reçu le Prix spécial du Jury à Cannes en 1998. Son adaptation au théâtre devait forcément souffrir de la comparaison. Comment représenter l'effet si réaliste et proche d'une caméra à l'épaule, l'atmosphère suffocante d'une famille bourgeoise où rien ne doit être dit, la tension perpétuelle des personnages entre eux, dans un théâtre aussi grand que celui du Rond-Point des Champs-Elysées ?Daniel Benoin, a choisi pour cela de nous immerger dans cette famille par une mise en scène interactive. Le décor se fond dans le public, lui-même véritable acteur de la pièce : une partie des spectateurs va assister réellement, en prenant place directement sur la scène, à ce repas. Si l'idée ne manque pas d'originalité, l'astuce ne marche pas vraiment. La non distanciation public-scène met le spectateur mal à l'aise. Malgré des acteurs remarquables, le gigantisme du plateau rend certaines scènes intimes difficiles à apprécier. En revanche, la seconde partie du spectacle, davantage rythmée, redonne corps et puissance au drame. Jusqu'à la scène finale, très émouvante, entre Christian et sa sœur Linda.