La compagnie Lazzi Théâtre, comme son nom le laisse deviner, fait revivre la commedia dell’arte. Cet art populaire du jeu masqué, de personnages codés et à la limite du clownesque, son univers satirique et drôle, qui cependant n’empêche pas une certaine dénonciation, bien au contraire, est un art ancien. N’ayant pas de traces écrites du jeu et du travail de la commedia, les artistes contemporains doivent se référer à d’anciennes représentations (tableaux, gravures...). Bien qu’il reste flou et à redécouvrir, cet art est aujourd’hui retravaillé par différents comédiens et créateurs de masques dans le monde entier. La compagnie Lazzi Théâtre fait partie de ces artistes.Avec Sans Culottes, ils reviennent sur la Révolution française de 1789 d’une manière décalée. Drôle de leçon d’histoire. La scène du Grand Rond est transformée et l'on croirait y voir les tréteaux de bois sur lesquels étaient joués les lazzis de la commedia en pleines rues, comme autrefois. Pas de décor, juste des draps tendus pour créer plusieurs entrées à jardin, à cour et en fond de scène. Les costumes sont travaillés avec attention et faits avec les moyens du bord. On sent la passion, l’envie et le travail dans tous les domaines (et oui, dans ce métier, il est important d’être polyvalent et débrouillard !) d’une compagnie modeste qui aime rêver et rire avec et pour nous.Les masques du créateur Den, sont magnifiques ! Dommage qu’il n’y ait que Pantalone et Polichinelle. Un Pantalone bien vif d’ailleurs. Ce vieillard porte le poids des années et s’excite pour l’argent. Ce Pantalone-là, interprété par Claude Calonge, est un bourgeois plein d’entrain. Mais saluons la performance de ces trois comédiens qui donnent énormément sur le plateau et n’hésitent pas à mouiller la chemise (au sens littéral). Claude Calonge, Guillaume Cuq et Jean-Paul Plot interprètent tous plusieurs personnages dans une cadence endiablée. Passant d’un noble jouant de l’épée à un Polichinelle serviteur un peu bête et bourru, d’un Populo qui lutte et ameute les foules pour défendre les droits de la classe ouvrière et (surtout) paysanne à une vieille rebouteuse aux grosses fesses et sans dents. Durant 1h30, ils ne sont que trois comédiens à tenir une histoire comique qui retrace celle de la Révolution française, en portant différents costumes qui ne sont pas des plus simples ni des plus pratiques. Pourtant, le rythme est soutenu et on ne s’ennuie jamais.Dès le début, le public est mis à contribution et se laisse prendre au jeu. Ces trois-là nous embarquent avec eux dans leur délire, et on retrouve nos réactions spontanées d’enfant, devant un spectacle de Guignol !Il ne se passe pas une minute sans un jeu de mot ou une allusion comique avec les faits (souvent marquants) de notre actualité. Strauss-Khan, Sarkozy, le foot... tout y passe. Et nous, on rit, on rit !Il est vrai que le spectacle peut surprendre de prime abord : un jeune banlieusard lillois qui débarque par on ne sait quelle magie en 1789 dans les campagnes près de Toulouse, il y a là de quoi être étonné. Mais finalement, on rit tellement, les acteurs et les personnages sont tellement drôles et attachants, que ce détail finit par n’avoir aucune importance. A Claude Calonge, Guillaume Cuq et Jean-Paul Plot, un grand merci pour ce spectacle drôle et décalé... tout en étant sérieux et important à la fois.