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 Un barbecue Ă la campagne, c'est chouette. Mais quand il n'y a pas de saucisses, c'est la catastrophe.
Amélie Cornu est une jeune auteure qui trouve les mots justes en posant un regard extérieur sur les situations du quotidien. La qualité de son écriture se définit par des petites phrases simples et convaincantes, des expressions touchantes et blessantes, des sentiments maquillés et amers. Tri(s) sélectif(s) est une pièce d'aujourd'hui qui soulève la question du développement durable chez les jeunes couples. Osmose émotionnelle et conflit d'intérêt porté sur la supériorité matérielle de l'homme sur la femme ne font pas toujours bon ménage. Clin d'il à la génération de grand-papa et grand-maman. Le fil conducteur des mentalités a évolué en suivant les lacets serpentés de la société. Cependant, la liberté de l'un se conditionne aux exigences de l'autre.
L'histoire de Tri(s) sélectif(s). Pierre (Thomas Baudeau) et Louise (Pauline Savoye) sont sur le départ. Agitation dans l'appartement, les saucisses manquent à l'appel. Ce week-end, le jeune couple a décidé d'inviter Diane (sur de Pierre, Amélie Cornu) et Max (ami de Louise, François Grolier) à une barbecue-partie à la campagne. Pierre est un jeune chef d'entreprise, soucieux de son image. A défaut de porter le costume trois pièces de patron, l'arrogance, l'insolence et la mauvaise foi l'habillent de la tête aux pieds. Il harangue sa femme comme s'il s'agissait d'une chose mécanique qui doit obéir à la moindre impulsion. Louise, c'est une épouse qui dit amen à tout. Les remontrances de Pierre font mine de ne pas l'affecter. Sa gentillesse quasi surnaturelle lui donne l'apparence des braves filles de la campagne. Le sourire en pointe à pitre exaspère ses proches. Pourtant, il faut toujours se méfier de l'eau qui dort.
Diane, la sur de Pierre, est une fille qui organise sa vie selon ses convictions éco-citoyenne. Un peu marginale, un soupçon cassante, elle éprouve maintes difficultés de s'accrocher à un garçon. Faudrait-il qu'elle le séduise et le trouve à son goût. Toutes ses aventures pseudo-amoureuses se sont soldées par des échecs qui finissent par lui ternir le caractère.
Max, ami de Louise, c'est l'intello du mini groupe. Prof de latin futur ex-Khâgne, il manifeste son désenchantement pour la campagne. Il est libre Max, il n'est pas libre Max. Libre d'assumer sa condition d'homo, pas libre de s'exprimer comme il le souhaiterait. Il faut préciser que ses amis sont adeptes d'une culture en friche.
Le cercle des joyeux amis devient rapidement au fil de la pièce le cercle des joyeux désespérés. Une barbecue-partie qui tourne en cocotte minute.
Pour tout décor, des cubes en bois blanc feront l'affaire. D'utilité collective, ils sont aisément modulables et transformables en éléments de mobilier intérieur et extérieur. La pièce se construit sur la base de plusieurs saynètes durant lesquelles les comédiens n'arrêtent pas de déménager, gesticuler, se poser quelques secondes et c'est reparti pour un tour de piste. Aux convenances succèdent la malchance, l'intempérance, l'arrogance et peut-être la vengeance. La vraie personnalité des quatre protagonistes se dévoilent dans l'évolution de la pièce. Un streap-psycho très chaud. Les amitiés sont fugaces, les règlements de compte sont cocasses.
Les quatre comédiens jouent des rôles taillés sur mesure car chacun véhicule le reflet de l'individu croisé dans la rue. Des caricatures contextuelles interprétées avec réalisme et conviction. Tout le monde se reconnait dans l'un des traits de caractère exprimé in situ : la bonté, la désinvolture, l'agacement, l'ennui.
La mise en scène ressemble à un jeu de cubes qui se montent et se démontent en un rien de temps. Justement, la trame de l'histoire passe de scène en scène sans ménagement. La musique électro s'acoustique selon la tension dégagée entre deux épisodes.
Franck Duarte, le metteur en scène, pose sa griffe avec brio sur un état de fait sociétal qui gagne les jeunes générations et gangrène les relations de couple : on s'identifie à l'autre selon une apparence matérielle librement voulue. La consommation outrancière ouvre les portes d'une nouvelle forme d'isolement psychique, le harcèlement.
Celui qui s'est construit un empire à la force du poignet, a-t-il le droit et le pouvoir d'écraser les autres sur son passage ? La réponse est négative, bien entendu. Sinon, la communication est définitivement coupée dans le couple. Une mise en scène intelligente, contemporaine et raffinée par la qualité du texte exprimé. |
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Mis à jour le 02/06/2011
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